Sauter à un chapitre clé
Cette nouvelle forme de conflit va trancher avec les stratégies militaires traditionnelles de guerre de mouvement et occasionnera près de 11 millions de morts pour seulement 12 km de terrain. Avec d'abord la bataille de la Marne, cette guerre en deviendra une d'usure avec diverses batailles de renom comme celle de Verdun ou de la Somme. Voici l'histoire de la guerre de position.
- D'abord, on présentera l'opposition entre guerre de mouvement et guerre des tranchées en détaillant ce qu'est une guerre d'usure.
- Ensuite, on creusera le sujet des tranchées avec le contexte et le déclenchement de la bataille de la Marne.
- Enfin, on abordera cette stratégie militaire avec la bataille de Verdun et la bataille de la Somme et le dénouement.
Guerre d'usure et guerre des tranchées
Une guerre d'usure est un type de stratégie militaire qu'un ou les deux camps d'une guerre peuvent suivre. Durant la Première Guerre mondiale, elle s'est faite par le biais des guerres des tranchées et incarne une fracture avec l'ancien modèle des guerres de mouvement.
Guerre de mouvement
La guerre de mouvement est l'opposé de celle de position dans le sens où elle implique la démultiplication et le déploiement rapide et simultané de nombreuses troupes sur multiples fronts mobiles.
La bataille de la Marne (5–10 septembre 1914), sur laquelle nous reviendrons incessamment sous peu, est un exemple éloquent d'une victoire française lors de cette guerre de mouvement.
La guerre de mouvement reposait autrefois sur l'infanterie légère et la cavalerie, des formations que l'on observe depuis des temps immémoriaux dans les conflits entre humains. L'invention de l'artillerie et de l'aviation change la donne et les stratèges militaires comprennent qu'un tir bien placé pourrait décimer des milliers de leurs troupes. De fait, on adopte un modèle hybride avec des nombres réduits de troupes d'infanterie soutenus par l'artillerie ou des avions et on tente ainsi de gagner du terrain progressivement. Cela dit, à l'échelle du conflit mondial, les deux camps vont opter pour autre chose.
Quelles sont les caractéristiques de la guerre d'attrition ?
La guerre d'usure (ou d'attrition) consiste à épuiser l'ennemi par des pertes continues en personnel et en ressources jusqu'à briser sa volonté de combattre.
La guerre d'attrition n'est pas axée sur des victoires stratégiques majeures ou sur la prise de villes ou de bases militaires. Elle se concentre plutôt sur de petites victoires continues.
Elle peut prendre la forme d'embuscades, d'escarmouches et de guets-apens.
Elle réduit les ressources militaires, financières et humaines de l'ennemi.
Quelles sont les caractéristiques de la guerre des tranchées ?
La guerre des tranchées se caractérise par plusieurs batailles opposant les différents camps à l'aide d'un réseau de tranchées (des galeries de tunnels) construit par l'homme qui s'étend sur des centaines de kilomètres. Le territoire qui sépare les tranchées opposées est appelé le no man's land. Les soldats subissent :
bombardements incessants ;
tirs d'embuscade ;
balayage par les mitrailleuses ;
ennui profond dans des conditions insalubres, parfois interrompu par d'éphémères et atroces contre-attaques.
Les tranchées prennent de l'importance avec l'avènement de nouvelles technologies utilisées principalement pour la guerre. Désormais, des mitrailleuses fixes peuvent être installées en surplomb des tranchées pour « arroser » quiconque souhaiterait traverser le no man's land. Une seule arme tenue par un seul soldat a dorénavant la puissance de feu d'une centaine d'hommes tirant simultanément avec leurs fusils. En multipliant les mitrailleuses tout du long des tranchées, on peut couvrir des dizaines de kilomètres de front et semer la terreur dans les lignes ennemies.
Artillerie
La guerre des tranchées accélère le processus de création d'armes telles que la mitrailleuse, une arme à feu innovante qui révolutionne l'ère du fusil. Ces nouvelles armes sont utilisées spécifiquement dans les tranchées.
Les mitrailleuses et l'artillerie mobile, comme les chars, permettent l'attaque d'une position fortifiée difficilement prenable et dangereuse. En raison de leur récente invention, les mitrailleuses et les chars d'assaut ne sont pas destinés à des conflits rapprochés, mais plutôt à des conditions plus mobiles. C'est le pire environnement possible pour déployer des chars qui risquent de s'empêtrer sur le terrain et ne plus avancer. Les conditions difficiles poussent la plupart des soldats à utiliser leurs fidèles fusils et à effectuer des tirs à l'aveuglette depuis les tranchées.
D'où viennent les tranchées ?
Nous allons aborder comment la guerre de position et les tranchées sont apparues dans un conflit initialement orienté vers la guerre de mouvement.
Début de l'impasse
Au départ, l'Allemagne prévoit une guerre courte grâce à son « plan Schlieffen ». Cette stratégie consiste à vaincre la France en l'espace de six semaines avant de se tourner vers la Russie. Elle évite ainsi de mener une guerre sur les « deux fronts », c'est-à-dire sur le front occidental contre la France et sur le front oriental contre la Russie.
Bataille de la Marne
En septembre 1914, le plan Schlieffen échoue lorsque les forces allemandes sont vaincues et contraintes de battre en retraite lors de la bataille de la Marne.1
La bataille de la Marne permet d'éviter la prise de Paris par les Allemands qui en sont à 50 km. Elle incarne l'efficacité dévastatrice que peut avoir une guerre de mouvement bien faite. En effet, le commandant en chef Joseph Joffre et le général Joseph Gallieni effectuent une contre-attaque réussie sur le flanc droit de l'armée allemande qui n'est plus protégé et comporte moins d'hommes. Près de 2 millions de soldats s'affrontent sur un champ de bataille de plus de 200 km.
Quelques semaines après la bataille de la Marne, les deux camps du front occidental terminent la construction d'un labyrinthe de tranchées défensives s'étendant de la côte belge à la frontière suisse. C'est ce qu'on appelle les « lignes de front ». Voilà d'où vient la guerre de position.2
Le no man's land
Ces lignes de front restent en place jusqu'au printemps 1918, lorsque la guerre redevient mobile.
Les deux camps constatent rapidement qu'ils peuvent remporter de petites victoires en passant par-dessus les tranchées, dans le no man's land. De là, grâce à l'efficacité des mitrailleuses qui les couvrent, ils peuvent s'emparer des tranchées ennemies. Cependant, dès qu'un bout de terrain est gagné, les défenseurs se mobilisent et contre-attaquent. Dans ce cas de figure, les attaquants perdent le contact avec leurs lignes de ravitaillement et de transport, alors que celles des défenseurs sont intactes. Par conséquent, ces petits gains de terrain sont souvent reperdus rapidement et ne parviennent pas à se convertir en changements durables.
Il en résulte une situation dans laquelle les deux camps ne prennent l'avantage que temporairement et de manière limitée pour rapidement les reperdre ailleurs. Aucune des armées ne parvient à en faire une victoire tactique plus importante. Voilà pourquoi cette guerre de position dure de nombreuses années.
Stratégie militaire : guerre de position
L'année 1916 est le théâtre de certaines des batailles les plus longues et les plus sanglantes de l'histoire du monde.
Bataille : Verdun
En février 1916, les Allemands attaquent le territoire stratégique français de Verdun. En gagnant ce territoire, ils espèrent provoquer des contre-attaques françaises et pouvoir utiliser l'artillerie allemande à outrance pour les balayer. Ainsi, le général Erich von Falkenhayn (à l'origine de ce plan) espère repasser d'une guerre de position à une de mouvement.
Cependant, le général surestime la capacité des Allemands à infliger des pertes disproportionnées aux Français. Les deux camps se retrouvent coincés dans une bataille éreintante de neuf mois. Les Allemands subissent 330 000 pertes et les Français 370 000.
Les Britanniques lancent alors leur propre plan stratégique pour alléger la pression exercée sur l'armée française à Verdun. C'est ce qui entraîne la bataille de la Somme.
Bataille : Somme
Entre juillet et novembre 1916, la bataille de la Somme fait rage sur le front occidental. Les Alliés perdent 620 000 hommes et les Allemands 450 000 hommes pour gagner seulement 12 km de terrain.
Les Britanniques perdent 420 000 soldats et les Français près de 200 000.
Le général Douglas Haig, qui commande l'armée britannique, décide de lancer un bombardement continu de sept jours sur les lignes ennemies allemandes. Il s'attend à ce que cela détruise tous leurs canons et toutes leurs défenses, et ainsi permette à son infanterie d'avancer facilement en pénétrant directement dans les tranchées allemandes.
Toutefois, cette stratégie s'avère inefficace. Les deux tiers des 1,5 million d'obus tirés par les Britanniques sont des éclats d'obus. Bien qu'efficaces à l'extérieur, ils ont peu d'impact sur les abris fortifiés. Ainsi, environ 30 % des obus n'explosent pas.
Le 1ᵉʳ juillet 1916, à 7 h 30 du matin, Douglas Haig ordonne à ses hommes de passer à l'attaque. Au lieu de pénétrer aisément dans les tranchées allemandes de face, ils se dirigent tout droit dans un barrage de mitrailleuses allemandes, inconscients de ce qui les attend. La Grande-Bretagne perd plus de 57 000 hommes ce jour-là.
Cependant, comme Verdun est toujours sous pression, les Britanniques décident de poursuivre le plan. Ils réalisent quelques gains, mais souffrent également des contre-attaques allemandes. La « grande poussée » prévue se transforme en une lente lutte d'usure qui épuise les deux camps.
Finalement, le 18 novembre 1916, Haig met fin à l'offensive.
Dénouement
Alors que le front de l'ouest est bloqué depuis moult années, tout change au début de 1918. Les Allemands reprennent la guerre de mouvement et lancent l'offensive de printemps le 21 mars 1918, aussi appelée la deuxième bataille de la Marne.
Celle-ci, à cause d'une erreur stratégique, sera le premier domino d'une longue série de rebondissements militaires et géopolitiques (offensive des Cent-Jours, retrait de la Russie, etc.). Ils amènent éventuellement à la démission de l'empereur allemand Guillaume II le 9 novembre. La signature de l'armistice le 11 novembre 1918 met officiellement fin à la Grande Guerre et plus de 16 traités sont signés pour ramener la paix sur le territoire européen.
Guerre de position - Points clés
- La guerre de position est une guerre où les deux camps s'affrontent par intermittence sur un terrain fixe et délimité par des tranchées respectives et séparées par un no man's land entre les deux lignes.
- L'attrition est une stratégie militaire qui consiste à épuiser continuellement un ennemi en lui faisant subir des pertes constantes en personnel et en ressources jusqu'à briser son moral. On appelle aussi cela guerre d'usure.
- Lors de la Première Guerre mondiale, cette guerre d'usure prend la forme d'un réseau de tranchées s'étendant sur plus de 640 km : la ligne de front.
- Au départ une guerre de mouvement, avec notamment la bataille de la Marne en 1914, ce n'est qu'en 1918 qu'elle le redevient.
- Les batailles sanglantes de Verdun et de la Somme en 1916 sont deux exemples de guerre de position avec la méthode de l'usure.
- Le bilan humain total s'élève à approximativement 11 millions de soldats décédés au front avec 2/3 durant les combats et 1/3 des maladies.
Références
- DERYNCK Stéphanie, « La Bataille de la Marne de 1914 », Site Internet Musée de la grande guerre (10/18/21, consulté le 16/03/23)
- BOFF Jonathan, « Fighting the First World War: Stalemate and attrition », Site Internet British Library (06/11/18, consulté le 16/03/23)
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Questions fréquemment posées en Guerre de position
Qu'entend-on par guerre de position ?
Une guerre de position implique un conflit dans lequel deux camps et leurs troupes sont fixes plutôt que mobiles comme dans une guerre de mouvement. Elle privilégie les petites victoires et l'usure des troupes ennemies via les tranchées.
Qu'est-ce que la guerre de position en 1914 ?
La guerre de position en 1914 n'existe pas encore et prendra forme en 1916 avec les batailles de Verdun et de la Somme : l'incarnation même de la guerre d'usure.
Qu'est-ce que la guerre de mouvement et de position ?
La guerre de mouvement implique le déplacement rapide de nombreuses troupes sur divers fronts alors que celle de position implique un terrain fixe séparé par un no man's land et un réseau de tranchées où vivent les troupes.
Quelles sont les dates de la guerre de position ?
Les dates de la guerre de position se sont principalement déroulées de l'automne 1914 au printemps 1918. Cette longue phase sera ponctuée de grandes batailles (Marne, Verdun, Somme).
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