Thomas d'Aquin

Contexte

Même si la vie intellectuelle de l'Église était limitée par son dogme religieux strict, l'Église a connu des changements au cours du Moyen Âge. Par exemple, saint Augustin d'Hippone (354-430) est l'un des principaux penseurs des débuts du christianisme. Augustin s'est servi du philosophe grec antique, Platon, pour éclairer la théologie chrétienne. Augustin a laissé un impact significatif et était connu dans tout le monde chrétien : Afrique du Nord, où il a vécu, Moyen-Orient, berceau du christianisme, et Europe. Les œuvres les plus connues d'Augustin sont les Confessions et la Cité de Dieu.

Plus tard, la scolastique médiévale s'est développée à partir de la théologie chrétienne et de la philosophie grecque antique aux XIe et XIIe siècles, atteignant son apogée au cours des deux cents années suivantes. À cette époque, les penseurs chrétiens ont choisi d'utiliser les œuvres d'un autre philosophe grec ancien, Aristote. Aristote était un élève de Platon. Il a organisé une grande partie du travail de son maître. Cependant, contrairement à Platon qui mettait l'accent sur la métaphysique - lanature de la réalité - Aristote s'est également intéressé à la logique et aux sciences naturelles dans une plus large mesure. Ce sont ces aspects de l'aristotélisme qui sont devenus particulièrement importants pour la scolastique médiévale.

Thomas d'Aquin : Vie et pensée

Thomas d'Aquin est l'un des penseurs catholiques les plus importants de toute l'histoire du christianisme. Il a été canonisé comme saint par le pape Jean XXII en 1323.

Saint Thomas d'Aquin, un retable, Ascoli Piceno, Italie, Carlo Crivelli, 15e siècle. Source : Wikipedia Commons (domaine public).

Saint Thomas d'Aquin : Biographie

Thomas d'Aquin, ou Tommaso d'Aquino, est né d'Andulf d'Aquino et de Théodora de Teano, une famille noble bien placée, à Roccasecca, en Italie. Il fait ses premières études à Monte Cassino, dans un monastère bénédictin. La famille noble de Thomas a cherché à amplifier son statut social en faisant en sorte que le garçon devienne un jour un abbé de haut rang.

En 1239, Aquin rentre chez lui et commence bientôt à fréquenter l'université de Naples. Dans ce cadre universitaire, il s'initie à la philosophie et à la science à partir de textes traduits à la fois du grec et de l'arabe. À cette époque, Aquin devient également dominicain, un nouvel ordre religieux fondé en 1216. Il préférait sa structure car elle traitait les frères - sesmembres -de façon plus démocratique. Les Dominicains donnaient également la priorité à l'éducation et à la prédication par rapport à un mode de vie monastique plus calme, fait de travail manuel et d'introspection. Les frères étaient mendiants, c'est-à-dire qu'ils dépendaient des aumônes qu'ils recevaient.

En tant que nouveau dominicain, Aquin a été envoyé à l'université de Paris pour poursuivre ses études. Cependant, il a été enlevé par sa propre famille au cours de ce voyage et retenu contre son gré pendant un an. Pourtant, en 1245, Aquin a finalement réussi à se rendre à Paris. Là, le jeune homme étudie auprès de l'un des plus grands penseurs scolastiques du Moyen Âge, Albert le Grand.

À l'université de Paris, l'Aquinate continue d'apprendre les sciences et la philosophie à travers les œuvres d'Aristote. Tout le monde ne voyait pas d'un bon œil la fusion des travaux de ce philosophe grec avec la théologie chrétienne. En effet, l'Église s'oppose à l'utilisation de la pensée logique et du naturalisme car ce type d'influence corrompt la jeunesse aux yeux de ses autorités. Néanmoins, l'Aquinate continue d'étudier Aristote, suivant la tendance d'autres scolastiques importants, comme son propre professeur, Albert le Grand, et l'érudit anglais Roger Bacon, qui travaillait également à Paris à cette époque.

À la fin de ses études, l'Aquinate donne des conférences et travaille comme conseiller théologique à la Curie papale - l'organe directeur de l'Église - à partir de 1259. Il enseigne également au couvent de Santa Sabina, en Italie, de 1265 à 1267. En 1268, il retourne à Paris pour être maître régent dans le cadre de sa nomination par l'ordre dominicain.

Le triomphe de saint Thomas d'Aquin. Thomas d'Aquin assis entre les anciens philosophes grecs Platon et Aristote, par Benozzo Gozzoli, 1471. Source : Louvre, Paris, Wikipedia Commons (domaine public).

Thomas d'Aquin : Thèmes intellectuels clés

Thomas d'Aquin a écrit plusieurs ouvrages analysant de nombreuses questions essentielles de la scolastique de l'époque. La langue qu'il utilise est le latin médiéval. Son œuvre la plus connue est la Somme théologique, rédigée vers 1265-1273. Ce texte n'était pas terminé à la mort de l'Aquinate. Summa Contra Gentiles est un autre ouvrage célèbre écrit en 1258-1264. Aquin a également consacré certains de ses écrits à Aristote, plus précisément. Ces ouvrages étaient des commentaires sur l'Éthique nichomachéenne et Sur l'âme (De Anima) d'Aristote. L'Aquinate a abordé de nombreux sujets cruciaux pour la pensée chrétienne médiévale, notamment la liberté, la providence, la raison et la foi.

L'un des débats critiques de la scolastique à cette époque portait sur la relation entre la raison et la foi . Les scolastiques se demandaient si la raison devait être subordonnée à la foi ou en être indépendante. L'Aquinate et ses disciples ont souscrit à l'idée que la raison peut fonctionner dans le cadre de la foi chrétienne. Cependant, dans le même temps, la raison est soumise à ses propres lois. L'Aquinate croyait que Dieu avait donné aux humains un esprit rationnel et un langage. Ainsi, ces dons divins faisaient automatiquement partie de la foi. En d'autres termes, selon l'Aquinate, les théologiens croyaient en la primauté de la foi mais pouvaient utiliser la raison pour analyser le monde qui les entourait et arriver à certaines conclusions. En effet, l'Aquinate est sans doute le premier penseur chrétien de premier plan à décrire ouvertement et à systématiser la raison et la foi de cette manière.

L'Aquinate s'est également penché sur la question de la liberté, en l'abordant dans le contexte du déterminisme naturel. À son tour, l'ordre de la nature s'enracine dans la création continue par le Dieu-créateur. Dieu gouverne tout ce qu'il crée selon les lois de la providence - laguidance divine. Ces lois sont chargées d'accorder un type de nature particulier à chaque être existant et d'agir en fonction de celui-ci. Ce système fait des humains le summum des créatures rationnelles. Les humains peuvent agir à la fois intellectuellement et physiquement. C'est là que réside la liberté humaine telle que la définit la relation avec Dieu.

Comme d'autres scolastiques, l'Aquinate souscrit également à l'argument cosmologique. Cet argument se trouve à la fois dans les œuvres de Platon, comme ses Lois, et d'Aristote, comme sa Physique et sa Métaphysique. L'argument cosmologique consiste à prouver l'existence de Dieu en tant que cause première qui met tout le reste en mouvement. Thomas d'Aquin s'est également intéressé à l'approfondissement de cet argument. Il a exploré la question d'une cause durable qui permet aux choses de continuer à exister, et pas seulement la cause première qui les fait naître en premier lieu.

Citations : Thomas d'Aquin

Livres : Thomas d'Aquin

• Sur les Hebdomades de Boèce (1257)
• Question contestée de la vérité (1256-9)
• Summa Contra Gentiles (1259-64)
• Sur le De Anima d 'Aristote (1268)
• Somme théologique (1266-73)

L'influence de Thomas d'Aquin

La scolastique médiévale a fini par décliner avec l'avènement de la Renaissance en Europe au XVIe siècle. Peu à peu, les penseurs de la Renaissance se sont éloignés de la théologie en tant que force dominante de la société et se sont concentrés sur les sciences naturelles - fondées sur l'observation plutôt que sur des preuves textuelles - ainsi que sur la remise en question de la philosophie grecque classique. Cependant, Thomas d'Aquin est resté une influence culturelle importante au sein et au-delà de la pensée chrétienne occidentale. Par exemple, le célèbre romancier irlandais James Joyce s'est explicitement inspiré des idées de Thomas d'Aquin sur la vérité et la beauté.

¹ Thomas d'Aquin : Selected Writings, traduit par Ralph McInerny, Londres : Penguin Books, 1998, p. 723.

² Ibid, p. 269.

³ Ibid, p. 370.