Moment clé du début de la guerre froide, le conflit entre la République de Corée (Corée du Sud) et la République populaire démocratique de Corée (Corée du Nord) est une guerre civile particulièrement sanglante. Par extension, elle incarne aussi le début de l'affrontement idéologique entre les États-Unis de Truman et l'Union soviétique de Staline. C'est aussi le premier conflit dans lequel le Conseil de sécurité des Nations Unies intervient militairement en envoyant des troupes de multiples pays membres prêter main-forte aux Sud-Coréens. Aujourd'hui encore, les Casques bleus de l'ONU surveillent et protègent la zone démilitarisée de Corée autour du 38ᵉ parallèle comme aucun accord de paix n'a été conclu depuis l'armistice de 1953.
- D'abord, on va aborder le contexte de la guerre de Corée avec les débuts de la guerre froide et de la guerre civile après la division du pays en deux États distincts en 1948.
- Ensuite, on décryptera toutes les phases de la guerre de Corée et on abordera le rôle de l'Union soviétique ou du Conseil de sécurité des Nations Unies.
- Après coup, on se penchera sur la doctrine Truman et la relation du président avec son général Douglas MacArthur, chargé du conflit sur place.
- Enfin, on dressera le bilan du conflit avec la zone démilitarisée autour du 38ᵉ parallèle qui maintient la séparation entre la République de Corée et la République populaire démocratique de Corée.
Contexte de la guerre de Corée
La guerre de Corée commence dans les premières années de la guerre froide.
Les débuts de la guerre froide
L'Union soviétique installe des gouvernements communistes en Europe de l'Est. Cette propagation du communisme alarme les États-Unis, incitant le président Harry S. Truman à publier sa doctrine Truman en 1947 qui stipule que les États-Unis endigueront la propagation du communisme dans tout nouveau pays.
Les tensions augmentent et culminent au cours des années suivantes avec le blocus de Berlin-Ouest et le pont aérien de Berlin en 1948–49. Les rebelles communistes de Mao Zedong prennent le contrôle de la Chine en 1949.
République populaire démocratique de Corée et République de Corée : fracture en 1948
Comme l'Allemagne, la Corée est divisée en zones d'occupation distinctes durant la conférence de Yalta. L'Union soviétique contrôle la partie nord du pays et les États-Unis la partie sud : les deux zones sont séparées par le 38ᵉ parallèle.
En 1948, en raison des tensions croissantes, les deux zones deviennent des États indépendants distincts. La République populaire démocratique de Corée est dirigée par le dictateur communiste Kim Il-sung. La République de Corée est menée par le leader semi-autoritaire Syngman Rhee et adopte une économie capitaliste. Tous deux souhaitent l'unification de la Corée sous leur tutelle.
Guerre de Corée : guerre civile sans précédent
La guerre de Corée commence avec l'invasion de la Corée du Sud par la Corée du Nord en juin 1950 et dure jusqu'à un armistice en juillet 1953.
Image 1. Déroulement de la guerre de Corée
Statut | Déroulement |
Phase 1 : invasion en septembre 1950 jusqu'à Pusan | 25 juin 1950 : les forces nord-coréennes franchissent le 38ᵉ parallèle et capturent Séoul, la capitale sud-coréenne, en trois jours. En septembre, elles ont tout le pays sauf un coin autour de la ville de Pusan dans le sud-est.
|
Phase 2 : reprise du territoire en novembre 1950 | Début août à mi-septembre 1950, les troupes américaines et de l'ONU regagnent le périmètre de Pusan. Une diversion organisée par MacArthur sur la côte ouest à Incheon le 15 septembre permet aux troupes de l'ONU de progresser rapidement et de reprendre la Corée du Sud au-delà du 38ᵉ parallèle.
|
Phase 3 : contre-attaque en janvier 1951, Séoul redevient communiste | |
Phase 4 : reprise de Séoul et enlisement militaire jusqu'en juillet 1953 | En mai 1951, les forces de l'ONU contre-attaquent, reprennent Séoul et progressent de nouveau au-delà du 38ᵉ parallèle avant de s'arrêter. Les négociations de paix commencent en juillet 1951, mais des combats sanglants et autres bombardements se poursuivent autour du 38ᵉ parallèle. Les lignes ne bougent pas.
|
Armistice | |
Rôle de l'Union soviétique et de la Chine
En 1948, Kim Il-sung veut envahir la Corée du Sud et bénéficie du soutien de Mao, l'ayant aidé durant la guerre civile chinoise. Staline, alors à la tête de l'URSS, hésite à apporter son soutien afin de ne pas provoquer les États-Unis. En 1950, il donne finalement son feu vert.
Grâce aux chars fournis par les Soviétiques et aux vétérans coréens endurcis par la guerre civile chinoise, les forces du Nord prennent vite le dessus sur leurs homologues sud-coréens qui n’ont ni chars ni artillerie lourde.
Dès le début, les Chinois préviennent qu'ils interviendraient si les forces de l'ONU pénètrent en Corée du Nord. Leur inquiétude croît à mesure que les forces de l'ONU approchent de la frontière entre la Chine et leur voisin lors de la phase 2.
Lors d'une réunion à la mi-octobre entre MacArthur et Truman, MacArthur fait valoir qu'il est peu probable que les Chinois interviennent réellement, ce qui amène Truman à approuver la poursuite de l'avancée : cette décision va forcer l'intervention chinoise durant la phase 3.
Conseil de sécurité des Nations Unies
Face à l'invasion, Truman se doit de réagir.
Les États-Unis portent donc l'affaire devant les Nations unies. Le 27 juin, le Conseil de sécurité des Nations unies adopte la résolution 83, qui demande aux États membres de fournir une assistance militaire à la Corée du Sud. De nombreux pays fournissent des troupes aux forces de l'ONU, mais la majorité d'entre elles sont des forces américaines, dirigées par le général Douglas MacArthur.
Image 2. Soldat hollandais de l'UNC
La force multinationale déployée en Corée est connue sous le nom de Commandement des Nations Unies (UNC). Il s'agit du premier commandement unifié de l'histoire. Un total de 20 nations contribuent à l'effort :
- 17 envoient des troupes de combat ;
- 5 autres du personnel médical et de l'aide humanitaire.
L'UNC continue aujourd'hui à opérer dans la zone démilitarisée autour du 38ᵉ parallèle entre la Corée du Nord et la Corée du Sud et garantit le maintien de la paix.
La doctrine Truman
Si nous laissons tomber la Corée, les Soviétiques continueront d'avancer et d'engloutir une région après l'autre.1
– Harry S. Truman à ses conseillers le 25 juin 1950
Cette déclaration fait écho à toutes celles qui suivront des présidents américains au sujet de l'expansion du communisme dans le monde (cf. la théorie des dominos d'Eisenhower). En effet, l'objectif de la doctrine Truman est d'endiguer l'expansion des communistes dans d'autres pays.
Truman est critiqué pour sa « mollesse » contre le communisme et pour avoir « perdu la Chine » après ne pas être intervenu dans la guerre civile chinoise. Ainsi, la guerre de Corée est une période particulière pour le président américain qui cherche à asseoir la superpuissance américaine tout en évitant une potentielle troisième guerre mondiale en provoquant la Chine ou l'Union soviétique.
L'affrontement entre Truman et MacArthur
Un épisode clé de la guerre est une prise de bec publique entre Truman et MacArthur.
Truman souhaite éviter une guerre totale avec la Chine à l'inverse de MacArthur qui préconise même l'utilisation d'armes nucléaires contre eux. En mars 1951, lorsque MacArthur critique Truman dans une lettre au leader républicain de la Chambre des représentants, Joseph Martin, lettre que Martin divulgue à la presse, Truman décide qu'il en a assez. Il démet MacArthur de son commandement en avril, qualifiant ses actions d'insubordination.
Truman a pris un grand risque politique, et il l'a fait immédiatement pour éviter la troisième guerre mondiale, mais aussi pour prouver le principe selon lequel les élus civils sont au-dessus des militaires.2
– H.W Brands, 13 octobre 2016
Image 3. Général MacArthur
MacArthur est très populaire et son limogeage provoque une réaction de l'opinion publique qui contribue à la décision de Truman de ne pas se représenter aux élections de 1952.
Nouveaux leaders pour un nouveau monde
Si la situation sur le terrain évolue peu au début de 1953, la situation politique, elle, n'est plus la même. Le nouveau président américain Dwight Eisenhower entre en fonction en janvier et souhaite arrêter la guerre. Staline est mort en mars et les dirigeants soviétiques se livrent à des luttes de pouvoir internes. Ils indiquent qu'ils ne soutiendront plus la Chine financièrement ou militairement.
Image 4. Signature de l'armistice, juillet 1953
Conséquences de la guerre de Corée
La guerre de Corée aboutit à un résultat où les deux parties peuvent techniquement revendiquer la victoire. L'absence d'issue claire autre que le maintien du statu quo d'avant-guerre est la raison pour laquelle on accorde souvent moins d'attention à la Corée qu'aux guerres mondiales ou du Vietnam, ce qui lui vaut le surnom de « guerre oubliée ».
Pourtant, 3 millions de personnes sont mortes, pour la plupart des civils. En matière de mortalité totale estimée, il s'agit du conflit le plus meurtrier de la guerre froide. Plus de 30 000 soldats américains sont morts pendant la guerre.
Image 5. Pertes civiles sud-coréennes avoisinant les 3 millions
La guerre confirme que les États-Unis sont prêts à recourir à l'action militaire pour atteindre leur objectif d'endiguement du communisme. Simultanément, cela ouvre la voie à de futures guerres par procuration en évitant une guerre directe avec l'Union soviétique ou la Chine.
Guerre par procuration : conflit armé que les grandes puissances mènent sur des territoires qui ne sont pas les leurs afin de faire avancer leur programme géopolitique, en évitant une guerre directe
En Corée, les tensions entre les deux camps et entre les États-Unis et la Corée du Nord palpitent encore. Un traité de paix définitif n'a jamais été signé et les deux parties restent techniquement en état de guerre. L'éventualité d'une reprise des combats est depuis lors un enjeu géopolitique mondial, surtout depuis que la Corée du Nord a développé ses propres armes nucléaires sous Kim Jong-un.
Guerre de Corée - Points clés
- La guerre de Corée commence par l'invasion de la Corée du Sud par la Corée du Nord de juin à septembre 1950.
- Elle résulte de la division de la Corée après la Seconde Guerre mondiale lors de la conférence de Yalta et incarne les premières tensions de la Guerre froide.
- Après le succès initial des forces nord-coréennes, une opération des Nations unies dirigée par les États-Unis les repousse et capture un gros morceau de la Corée du Nord. La Chine intervient et repousse les troupes de l'ONU de Corée du Nord, ce qui conduit à une impasse autour du 38ᵉ parallèle, frontière d'avant-guerre, impasse qui dure de la mi-1951 jusqu'à la fin des combats à la mi-1953.
- L'URSS, la Chine, les États-Unis et l'ONU jouent tous un rôle capital dans le déroulement de cette guerre par procuration.
- Le général MacArthur a une influence décisive dans la gestion du conflit armé.
- Surnommé « guerre oubliée », ce conflit fait près de 3 millions de morts, dont 30 000 soldats américains.
- Bien que la guerre se termine avec le maintien de la frontière autour du 38ᵉ parallèle et une zone démilitarisée (DMZ), un traité de paix n'a jamais été signé et les tensions dans la péninsule coréenne persistent.
Références
- Harry Truman, remarks to advisors, June 25, 1950 - History.com - Consulté le 26/01/2023
- H.W. Brands, Interview sur History.com, October 13, 2016 - Consulté le 26/01/2023
How we ensure our content is accurate and trustworthy?
At StudySmarter, we have created a learning platform that serves millions of students. Meet
the people who work hard to deliver fact based content as well as making sure it is verified.
Content Creation Process:
Lily Hulatt is a Digital Content Specialist with over three years of experience in content strategy and curriculum design. She gained her PhD in English Literature from Durham University in 2022, taught in Durham University’s English Studies Department, and has contributed to a number of publications. Lily specialises in English Literature, English Language, History, and Philosophy.
Get to know Lily
Content Quality Monitored by:
Gabriel Freitas is an AI Engineer with a solid experience in software development, machine learning algorithms, and generative AI, including large language models’ (LLMs) applications. Graduated in Electrical Engineering at the University of São Paulo, he is currently pursuing an MSc in Computer Engineering at the University of Campinas, specializing in machine learning topics. Gabriel has a strong background in software engineering and has worked on projects involving computer vision, embedded AI, and LLM applications.
Get to know Gabriel